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23 novembre 2019

Le pro­jet lova­ganza «RESSEMBLE À UNE FRAUDE», selon le juge Pierre C. Gagnon.

Le pro­jet Lova­ganza, qui a englouti des mil­lions pro­ve­nant de cen­taines d’investisseurs, a toutes les appa­rences d’une fraude, selon le juge de la Cour supé­rieure qui a entendu la demande d’action col­lec­tive dépo­sée par les vic­times de l’arnaque.

« Comme juge, je dois essayer de com­prendre la patente, et ça res­semble à une fraude en mosusse, d’après ce que je vois », a sou­li­gné le juge Pierre C. Gagnon, lors de l’audience qui se tenait la semaine der­nière au palais de jus­tice de Mont­réal. Au moins 650 per­sonnes se fai­sant pro­mettre des ren­de­ments fara­mi­neux ont investi des sommes tota­li­sant plus de 8,5 mil­lions dans le pro­jet Lova­ganza, censé pro­duire une série de films à grand déploie­ment pour finan­cer des pro­jets huma­ni­taires. Les pro­duc­teurs, sans expé­rience dans le domaine, disaient avoir l’appui de grands noms du cinéma pour réa­li­ser leurs films, qui devaient sor­tir en 2015, puis en 2018. Ils sont main­te­nant annon­cés pour 2020. L’Autorité des mar­chés finan­ciers (AMF) pour­suit les ins­ti­ga­teurs du pro­jet pour avoir bafoué les lois enca­drant les investissements.

ENCORE DE LA SOLLICITATION

Mal­gré le pro­ces­sus judi­ciaire, Mark-Érik For­tin et sa conjointe, Karine Lamarre, sol­li­citent tou­jours des fonds, et les soi-disant réa­li­sa­teurs Jean-Fran­çois Gagnon et sa conjointe, Gene­viève Clou­tier, conti­nuent de voya­ger de par le monde pour tour­ner des extraits et des enre­gis­tre­ments musicaux.

Les inves­tis­seurs seraient plus nom­breux, et les mon­tants plus éle­vés que ce qui a été décou­vert par l’AMF, selon des res­pon­sables du Regrou­pe­ment des vic­times de l’affaire Lova­ganza et One-Land, qui ont entre­pris un pro­ces­sus judi­ciaire pour ten­ter de récu­pé­rer une par­tie de leur argent.

Selon leur demande d’action col­lec­tive, les diri­geants de Lova­ganza « ont mis en place un stra­ta­gème frau­du­leux afin de sou­ti­rer des sommes aux membres du groupe, notam­ment en fai­sant miroi­ter des inves­tis­se­ments très pro­fi­tables allant jusqu’à 40 fois la mise, dans des pro­jets qui se sont révé­lés inexistants ».

Ils ont même pré­tendu « avoir l’appui de Ste­ven Spiel­berg, de Julian Len­non et de Bono, alors que cela était com­plè­te­ment faux », et ont « laissé croire à l’implication de socié­tés recon­nues, dont Walt Dis­ney Pictures ».

Le repré­sen­tant des inves­tis­seurs floués, Jean-Fran­çois Simard, qui était pré­sent en cour, est un ancien employé du pro­jet qui y a aussi investi, avant de retour­ner sa veste et de por­ter plainte à l’AMF contre ses anciens patrons.

« Le gros défi dans ce dos­sier, c’est de retra­cer l’argent », sou­ligne l’avocat du Regrou­pe­ment, Jean-Daniel Guessy, qui dit avoir espoir pour les vic­times, même si le pro­ces­sus risque de prendre des années. Il ne reste peut-être plus rien des sommes inves­ties, tou­te­fois. L’AMF a blo­qué les comptes liés au pro­jet en 2014, après avoir reçu des plaintes, mais ils étaient vides. Aus­si­tôt recueillis, la majo­rité des fonds étaient trans­fé­rés aux États-Unis pour ser­vir aux dépenses de tour­nage et de voyage de Gagnon et de Cloutier.

PLAIDER COUPABLE, PUIS CHANGER D’IDÉE

Les fon­da­teurs de Lova­ganza étaient absents du tri­bu­nal lors de la requête pour l’action col­lec­tive. Leur avo­cat, Éric Pla­mon­don, a refusé de répondre à nos ques­tions sur le rem­bour­se­ment éven­tuel des investisseurs.

Mark-Érik For­tin et sa conjointe, Karine Lamarre, les deux prin­ci­paux col­lec­teurs de fonds de Lova­ganza, ont plaidé cou­pable, en avril 2018, à res­pec­ti­ve­ment 52 et 27 chefs d’accusation liés aux lois enca­drant les investissements.

Ils n’ont pas encore reçu leur peine et ont demandé récem­ment le retrait de leur réponse à l’accusation. Un juge doit rendre sa déci­sion dans deux semaines à ce sujet, au palais de jus­tice de Lon­gueuil. Ils pour­raient éco­per de peines d’emprisonnement si leur culpa­bi­lité est maintenue.

Jean-Fran­çois Gagnon et Gene­viève Clou­tier, iden­ti­fiés comme pro­duc­teurs, réa­li­sa­teurs et scé­na­ristes, sont aussi pour­sui­vis par l’AMF. Leur pro­cès doit com­men­cer le 17 février prochain.

Ils voyagent par­tout sur la pla­nète et mènent un train de vie luxueux depuis des années, avec l’argent des inves­tis­seurs. Ils ne seraient pas reve­nus au Qué­bec depuis très long­temps. Selon l’adresse don­née aux auto­ri­tés judi­ciaires, ils habitent un cot­tage près de l’océan, à Santa Monica, en Californie.

Un groupe d’une cen­taine de vic­times a aussi déposé une plainte à la police pour fraude, en octobre 2017. À la Sûreté du Qué­bec, on dit attendre la conclu­sion du pro­ces­sus entre­pris par l’AMF avant de déclen­cher une enquête qui pour­rait mener à d’éventuelles accu­sa­tions criminelles.

DE L’ARGENT COMPTANT DANS UN SAC DE MCDO

Les avo­cats des per­sonnes visées par l’action col­lec­tive ont tenté de dis­cré­di­ter le repré­sen­tant des vic­times, Jean-Fran­çois Simard, en sou­li­gnant qu’il avait par­ti­cipé aux efforts pour sou­ti­rer de l’argent aux inves­tis­seurs, comme employé de Lovaganza.

M. Simard a notam­ment raconté, quand il a été inter­rogé il y a quelques mois, qu’il était payé comp­tant grâce à un inves­tis­seur, Mar­tin Har­vey, pro­prié­taire de res­tau­rants McDonald’s dans Lanau­dière, qui appor­tait l’argent dans un sac de papier au logo de ses établissements.

Joint par La Presse, Mar­tin Har­vey a indi­qué qu’il avait dila­pidé envi­ron 100 000 $ dans l’aventure, somme qu’il ne récu­pé­rera jamais, selon lui. Mais il ne sait pas si son argent a servi à payer des employés.

« Ce sont des requins. Ils me lais­saient miroi­ter de gros ren­de­ments, de 5 ou 10 fois ma mise, raconte l’homme d’affaires. Ils étaient convain­cants, mon­traient des extraits de films, c’était très pro­fes­sion­nel. Même si je suis dans les affaires, on ne fait pas tou­jours de bons coups dans la vie. »

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