Genevieve-Cloutier-et-Jean-Francois-Gagnon-Amende de 600 000

16 avril 2024

Amende de 600 000 $ pour JF&G.. pour le moment..

Les ins­ti­ga­teurs du pro­jet Lova­ganza, un couple ori­gi­naire de la Rive-Sud de Mont­réal qui par­court le monde depuis plu­sieurs années grâce à des cen­taines d’investisseurs pour un hypo­thé­tique pro­jet de films à grand déploie­ment, ont été condam­nés lundi à des amendes tota­li­sant 600 000 $.

ISABELLE-DUCAS_LA-PRESSE

Isabelle Ducas

Jour­na­liste éco­no­mie – finances

Jean-Fran­çois Gagnon et Gene­viève Clou­tier ont plaidé cou­pables à des accu­sa­tions por­tées par l’Autorité des mar­chés finan­ciers (AMF) pour avoir sol­li­cité illé­ga­le­ment des inves­tis­seurs entre 2014 et 2015.

Mais de nom­breux témoi­gnages indiquent que la sol­li­ci­ta­tion s’est pour­sui­vie pen­dant plu­sieurs années. Selon des inves­tis­seurs dés­illu­sion­nés qui se sont confiés à La Presse dans divers repor­tages publiés depuis 2016, au moins 20 mil­lions auraient été amas­sés auprès de 650 per­sonnes, qui se fai­saient pro­mettre des ren­de­ments repré­sen­tant cinq ou dix fois leurs mises.

Dans la recon­nais­sance de culpa­bi­lité du couple, enre­gis­trée en décembre der­nier, on évoque seule­ment une somme de 432 000 $ recueillie auprès de 12 inves­tis­seurs entre mai 2014 et mars 2015, qui n’a jamais été remboursée.

Jean-Fran­çois Gagnon et Gene­viève Clou­tier, qui indiquent habi­ter à Santa Monica, en Cali­for­nie, com­pa­rais­saient via Teams au palais de jus­tice de Lon­gueuil. Ils n’ont pas pris la parole devant le juge Jean-Phi­lippe Mar­coux, se conten­tant de dire qu’ils com­pre­naient la sen­tence pro­non­cée à leur égard.

Leur sen­tence est une sug­ges­tion com­mune des deux par­ties, enté­ri­née par le juge. « On estime que la sen­tence est appro­priée. Les vic­times n’ont pas récu­péré leurs pertes, mais on évite un pro­cès qui aurait pu durer envi­ron trois semaines », a sou­li­gné en cour l’avocate de l’AMF, Camille Rochon-Lamy.

Je vois la vie comme ci - JF&G PICTURES STUDIO
Geneviève Cloutier et Jean-François Gagnon

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM JF & G RECORDS

Gene­viève Clou­tier et Jean-Fran­çois Gagnon, qui se pré­sentent comme pro­duc­teurs, réa­li­sa­teurs et scé­na­ristes, sous l’appellation de « JF & G »

JF&G's Adventures:, Je Vois La Vie Comme Ci, The Musicals Instrumental Themes, www.jfgcompany.com,(Actors: Brey Chanadet, Alexandra Hulme, Charissa Kroeger, Emily Crouch, Evan Strand, KC Monnie, Mason Trueblood, Taylor Banks, Valentino Vladimirov, Devin Kopera, Gavin Meredith, Natallia Serikova, Casey Marshall, Cooper), Lovaganza 2015, Lovaganza 2020, The Lovaganza Convoy, The Lovaganza Foundation, www.lovaganza.com, The Markare Company, LLC, 4 Stars Group, Momentum Records, Momentum E. Productions: www.mep.world, THE JF&G COMPANY, JF&G, JF&G RECORDS, JF&G Pictures LLC, J.F. Gagnon, Jean-François Gagnon, Geneviève Cloutier Gagnon, Fer Rouge Creative Company, Helian Way Films, MARKARE, Karine Lamarre, Karine Fortin, Karine L Fortin, Mark-Erik Fortin, Marc-Éric Fortin, Mathieu Carignan, Matt Carignan, Marie-Ève Malherbe, Marie Malherbe, Louise Larente, Maurice Lalonde, SURVEILLÉS PAR:, AMF: Autorité des marchés financiers, Securities and Exchange Commission (AMF-USA), Sûreté du Québec, SPVM, www.Lovaganza-Scandal.com, AUTRES CIES:, Oneland, One-land, Oneland World, Sunshine Way Management, Safe Passage Entertainment, Road One Entertainment, Jean-Francois Gagnon - "JF", Genevieve Gagnon - "G"

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Karine Lamarre et Mark-Érik For­tin, en sep­tembre 2015

« Coconspirateurs »

Les prin­ci­paux res­pon­sables du finan­ce­ment sont Mark-Érik For­tin et Karine Lamarre, un autre couple de la Rive-Sud, qui sol­li­citent des fonds pour les envoyer ensuite à Jean-Fran­çois Gagnon et à Gene­viève Clou­tier, indique le docu­ment écrit dans lequel ces der­niers recon­naissent leur culpa­bi­lité et incri­minent ceux qui sont décrits comme leurs « coconspirateurs ».

Mark-Érik For­tin et Karine Lamarre, dont le pro­cès dure depuis 2016 à la suite de pro­cé­dures pénales inten­tées par l’AMF, ont plaidé cou­pables en 2018 à un total de 79 chefs d’accusation. Ils n’ont pas encore reçu leur sen­tence en rai­son de nom­breuses stra­té­gies uti­li­sées pour retar­der le pro­ces­sus judi­ciaire. L’AMF réclame une peine d’emprisonnement dans leur cas.

Au moment du dépôt des accu­sa­tions contre le couple For­tin-Lamarre, l’enquête de l’AMF avait per­mis d’identifier 2,7 mil­lions recueillis auprès de 140 épar­gnants et d’une dizaine d’entreprises.

« Train de vie extravagant »

Le couple Gagnon-Clou­tier, ins­tallé en Cali­for­nie et voya­geant par­tout dans le monde, uti­lise les sommes recueillies pour tour­ner des séquences de films et enre­gis­trer des chan­sons, mais aussi pour ses dépenses per­son­nelles, comme la loca­tion de voi­tures et de vil­las de luxe, ainsi que les dépenses de la gou­ver­nante de ses enfants. Au fil des années, le couple a dif­fusé plu­sieurs vidéos tour­nées à New York, à Los Angeles, à Londres, à Jéru­sa­lem, à Rome, à Mar­ra­kech, à Dubaï et au Kenya, notamment.

Le nom de Lova­ganza a été délaissé par le couple, qui dif­fuse main­te­nant ses vidéos avec la signa­ture « JF & G ».

Au pro­cès de leurs cocons­pi­ra­teurs, en novembre 2021, un enquê­teur de l’AMF a expli­qué le fonc­tion­ne­ment du groupe et les méca­nismes par les­quels les inves­tis­seurs financent les acti­vi­tés du couple Gagnon-Clou­tier : les fonds sont ver­sés en argent comp­tant, par chèque ou par vire­ment Interac, ou alors des cartes de cré­dit sont mises à la dis­po­si­tion du couple. Par­fois, les inves­tis­seurs paient eux-mêmes cer­tains four­nis­seurs, comme des socié­tés de production.

Geneviève Cloutier et Jean-François Gagnon-002

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM JF & G RECORDS

Gene­viève Clou­tier et Jean-Fran­çois Gagnon, qui se pré­sentent comme pro­duc­teurs, réa­li­sa­teurs et scé­na­ristes, sous l’appellation de « JF & G »

« Des courts métrages ont été pro­duits, mais l’argent sert aussi à sup­por­ter le train de vie extra­va­gant de Jean-Fran­çois Gagnon et de sa famille, a expli­qué l’enquêteur Jona­than Gabriele. Lui, sa femme, leurs enfants et la gar­dienne des enfants voyagent par­tout dans le monde, ils sont six à se déplacer. »

Pour décrire le pro­jet, Jona­than Gabriele a uti­lisé le mot « mégalomanie ».

Il a rap­pelé que les créa­teurs de Lova­ganza avaient pré­tendu avoir l’appui de grands noms d’Hollywood, comme Ste­ven Spiel­berg, avant de devoir se rétrac­ter quand les avo­cats du célèbre réa­li­sa­teur amé­ri­cain ont su qu’ils uti­li­saient son nom.

« Ils participent à des évènements mondains, ils ont organisé des évènements mondains à Cannes. Ils vivent une vie de riches pour attirer l’œil des producteurs. Ils expérimentent différents concepts créatifs sur le dos des investisseurs. »

–  L’enquêteur Jona­than Gabriele

« Le dossier n’est pas clos »

Pour­quoi l’AMF a‑t-elle limité les accu­sa­tions contre Jean-Fran­çois Gagnon et Gene­viève Clou­tier à la période 2014–2015, sachant que la sol­li­ci­ta­tion a duré beau­coup plus long­temps ? « Le dos­sier n’est pas néces­sai­re­ment clos », a répondu le porte-parole de l’AMF, Syl­vain Thé­berge. « Les accu­sés ont reconnu leur culpa­bi­lité, ils écopent quand même d’une amende impor­tante, alors on est satisfaits. »

Un des inves­tis­seurs, qui dit avoir englouti envi­ron 30 000 $ dans cette affaire, se désole du fait que plu­sieurs per­sonnes vul­né­rables aient perdu l’argent de leur retraite, en se fai­sant pro­mettre des ren­de­ments miro­bo­lants. « On était pas mal naïfs, fran­che­ment, d’être embar­qués dans cette gim­mick, mais on pen­sait faire quelque chose pour la paix. On pen­sait que ces gens étaient sin­cères », déplore Mario Man­cini, un entre­pre­neur montréalais.

En 2017, 75 plai­gnants ont déposé des plaintes pour fraude au Ser­vice de police de la Ville de Mont­réal contre les deux couples. Le dos­sier a ensuite été trans­féré à la Sûreté du Qué­bec, mais aucune accu­sa­tion cri­mi­nelle n’a été déposée.

QU’EST-CE QUE LE PROJET LOVAGANZA ?

En 2010, deux couples de la Rive-Sud se sont asso­ciés pour pro­duire une série de films à grand déploie­ment, des­ti­nés à finan­cer un pro­jet huma­ni­taire et une chaîne humaine autour du monde pour la paix, des évè­ne­ments qui ne se sont jamais concrétisés.

Au moins 20 mil­lions auraient été amas­sés auprès de 650 per­sonnes, qui se fai­saient pro­mettre des ren­de­ments repré­sen­tant cinq ou dix fois leur mise.

Jean-Fran­çois Gagnon et Gene­viève Clou­tier, accu­sés par l’AMF d’avoir sol­li­cité illé­ga­le­ment des inves­tis­se­ments, viennent d’écoper de 600 000 $ d’amende, tan­dis qu’une peine de pri­son est récla­mée pour Mark-Érik For­tin et Karine Lamarre, qui reviennent en cour le mois prochain.

NOTRE COMMENTAIRE

Par : Jean-Fran­cois Simard

En ce qui concerne Jean-Fran­çois Gagnon et Gene­viève Cloutier:

  • Étant à l'extérieur du pays, JF&G paie­ront-ils un seul sou de cette amende ? .. Et si oui, com­ment? .. Ça reste à voir !
  • Ce pre­mier 600 000 $ réclamé sera-t-il remis en dédom­ma­ge­ment au pro­rata des inves­tis­se­ments de leurs vic­times qui l'ont été sous les vus et sus de tout les corps poli­ciers et inter­ve­nants de la jus­tice ? .. Sinon pourquoi ?
  • L'AMF et le par­quet de la Cour sont-ils satis­faits de bou­cler à rabais une décen­nie d'enquête et de pro­cé­dures judi­ciaire oné­reuses avec une amende repré­sen­tant envi­ron 1,2 % du délit com­mis de 50M$ ? Où est l'argent ?
  • Si l'amende est payée : com­ment la jus­tice et l'AMF s'assureront-ils que la pro­ve­nance des fonds ne seront pas de nou­veaux fonds illé­gaux sol­li­ci­tés auprès de nou­velles vic­times ou pro­ve­nants de comptes off-shores (para­dis fis­caux) aux struc­tures écrans savam­ment maquillés ?
  • Quel mes­sage envoie-t-on à la société ? : – "L'impôt" (amende) sur les reve­nus d'activité de fraude au Qué­bec sont moins éle­vés que la TPS et la TVQ per­çues sur les acti­vi­tés com­mer­ciales légales ?
  • En décla­rant cou­pable, JF&G évitent et mini­misent l'impact de l'étalement publique et vir­tuel (web & inter­na­tio­na­le­ment) de leurs acti­vi­tés frau­du­leuses, ce qui en fait la meilleure stra­té­gie pos­sible pour la conti­nuité de leurs acti­vi­tés hors du Qué­bec et du Canada.

Beau­coup de ques­tions sont encore à venir et tou­jours bien peu de réponse malheureusement.
À suivre !